1) "
Qu'est-ce que l'Art Contemporain ? "
Cette
dénomination est une falsification de la langue car elle ne désigne pas -
comme son nom le laisserait supposer - la création de TOUS les artistes vivants
d'aujourd'hui, mais seulement celle d'une toute petite partie d'entre eux, ceux
adoubés par l'intelligentzia ( Art Press, les multiples livres, catalogues et
articles à sa gloire ), l'Officialité ( surtout en France avec les DRAC, FRAC,
Musées et lieux publics prestigieux " réquisitionnés" comme par
exemple à Versailles ) et par le grand capital ( les
artistes"importants" - comme par hasard essentiellement Américains -
valent plusieurs dizaines de millions de dollars ! ). La grande majorité des
artistes - qui sont tout aussi "contemporains" - son ainsi
marginalisés voire éradiqués.
2 ) " Quel Art pour le 21ème siècle ? "
Compte tenu de l'explosion des diverses formes plastiques et conceptuelles de
ces dernières décennies , il est bien difficile de présumer de l'avenir.
On peut toutefois avancer que :
Sauf à ce que la bulle spéculative éclate et que les formes dominantes
actuelles du " n'importe quoi " s'effondrent elles aussi ( et l'on
reviendrait alors à quoi ? ), il est probable que ce " n'importe quoi
" s'étende encore plus avec un effacement de plus en plus fort du sensible
au profit d'un conceptuel encore plus prégnant. Avec aussi des ramifications
numériques de plus en plus fortes et probablement des mélanges de genres ( on
assiste déjà de plus en plus à des rapprochements Art plastique / Architecture
/ Danse / Son... ).
3 ) " Quel est le rôle de l'artiste aujourd'hui ? "
Avec les années 68 beaucoup d'artistes ont pensé pouvoir agir, à travers leur
art, dans les rouages mêmes de la société. Ce fut un échec total, le
capitalisme absorbant toute velléité de renversement de son système.
Tel ou tel artiste "engagé" de l'époque, s'il n'a pas été évincé,
"vaut" aujourd'hui de l'argent et concourt donc au bon fonctionnement
de cette société de consommation hier contestée. Le seul rôle qui lui reste
donc aujourd'hui n'est plus dans le grippage possible des rouages de la société
capitaliste, mais - en particulier grâce à ces provocations actuelles - à faire
" évoluer" l'ouverture d'esprit des "regardeurs" .
Toutefois ceux-ci, comme les appelait Duchamp, n'étant qu'une petite élite et
la grande majorité de la population se désintéressant totalement de cet art
d'Avant Garde, le rôle de l'artiste parait donc bien circonscrit et bien
nombriliste...
4) "Quelles sont les limites entre l'Art et la marchandisation ?"
S'il y a toujours eu un rapport "normal" entre art et marchandise,
cela se faisait via un processus historique, intellectuel, formaliste...
incontesté par tous les protagonistes de l'Esthétique, du marchand à
l'historien en passant par les critiques. Aujourd'hui, avec le triomphe du
capitalisme depuis le milieu du 20ème siècle puis son hégémonie
internationaliste à la fin 20ème début 21ème ( chute de l'URSS, ouverture de la
Chine... ), ces critères ont totalement changés.
Il suffit dorénavant qu'une coalition de grandes fortunes et de grands lieux
d'expositions décide "d'investir" dans tel artiste pour ce que fait
cet "artiste" ( y compris le n'importe quoi actuel puisque, depuis
Duchamp donc, n'importe quoi peut être de l'art ) SOIT une œuvre d'art, et
surtout de l'art très important. Et pourquoi très important ? Parce que son
prix est très important... Un syllogisme qui évite de passer par les étapes de
reconnaissance habituelles qui, dans le système actuel de profit immédiat,
serait trop long. Et comme le grand capital s'est rendu compte que
l'investissement dans l'AC ( ainsi que le dénomme ses contempteurs -
sous-entendu; " Assez", "lassés" ! - ) était bien plus
rentable que tout autre placement ( en moyenne 600 % en quelques années alors
que n'importe quelle autre valeur - bourse, immobilier... - ne prend que
quelques pourcents par an ! ) il continue à maintenir à bout de bras cet
Eldorado. Et cela sans contradiction possible tant sur le processus lui-même (
tout un système est derrière ça et il est bien sûr pas question de le
renverser... ) que sur la qualité esthétique de la chose sauf à être considéré
alors comme inculte, réactionnaire voir même "nazi"...
5) "Est-ce le pouvoir de l'argent qui décrète de la beauté ?"
Même si ce questionnement n'est pas faux ( cf. le paragraphe précédent ) il
pêche dans son fondement car reposant sur la conception Kantienne du " est
beau ce qui plaît universellement sans concept ". Hors on sait bien
dorénavant que rien ne "plaît universellement"; par exemple la "
Fountain" de Duchamp, si elle plaît aux bobos du 6ème arrondissement de
Paris, a peu de chance de plaire - surtout en tant qu’œuvre d' art - à
des peuplades reculées du 1/4 monde qui ne connaissent probablement même pas
l'usage premier de cet ustensile sanitaire...
De même pour le "sans concept"; consciemment ou inconsciemment c'est
bien la somme des concepts façonnés par l'Histoire et la Philosophie, depuis
Platon jusqu'à Marcuse ( et plein d'autres ! ) qui, aujourd'hui, façonne notre
capacité à juger ce qui est censé être "beau" ou pas, compte tenu de
la réserve précédente.
CV
:
Francis
PARENT est Critique
d'Art, membre de la AICA ( Association Internationale des Critiques d'Art )
Parisien dorénavant installé en Luberon
a) A d'abord été Directeur Artistique d'une galerie d'Art à Vence ( 06 )
puis successivement ou concomitamment :
b) Enseignant ( secondaire, supérieur ), conférencier en France ( Centre
Pompidou et de multiples lieux d'arts ) et à l'étranger ( USA, Espagne, Grèce,
Italie, Maroc, Belgique)
c) Commissaire de très nombreuses expositions collectives thématiques et
personnelles dans divers Musées et lieux artistiques, en France et à l'étranger.
d) Président, ou membre de nombreux jurys en France et à l'étranger ( Président
du prix de la première Biennale de Dakar, etc. )
e) Auteur de nombreuses publications ; livres chez plusieurs éditeurs,
articles, études et préfaces dans diverses revues et catalogues.
f) Evènementiels divers : interviews donnés en presse écrite, radio et TV.
Coordinateur artistique des 1er et 2ème Croisières d'AC en Méditerranée et aux
Caraïbes. Co-commissaire du "50 Masters" pour les JO de Barcelone.
Concepteur du site internet " Artrinet ".
Livre réédité en 2016 :
« Le
salon de la Jeune Peinture, une histoire 1950-1983 »,
Francis PARENT – Raymond PERROT,
Editions PATOU